Après le Référendum en Crimée/Ukraine: Le Tour du Kivu ou du Katanga?

Les récents événements en Ukraine et plus particulièrement en Crimée préoccupent le monde entier du fait que la force militaire finira par absorber et primer sur le droit international. C’est aujourd’hui que les habitants de la Crimée adoptent, par referendum soutenu par l’armement militaire russe, leur indépendance et une probable annexion à la fédération russe ; un geste dont le sort est potentiellement connu d’avance. Les informations de ce lundi 17/03/2014 font étant d’une majorité de 96.7% des Criméens qui optent pour un rattachement à la Fédération Russe, bien que le referendum reste controversé. Ces développements sont suivis avec intérêt dans le milieu socio-politique en République Démocratique du Congo (RDC) car pourra constituer un ‘mauvais’ antécédent à la théorie de la « Balkanisation » de ce pays. La théorie de la Balkanisation du Congo-Kinshasa est utilisée n’importe où et n’importe comment à tel point qu’elle s’est vidée de son fondement, alors que prétendument possible.

La question principale qui se pose souvent est que la Balkanisation de la RDC est devenue un outil politique pour faire taire ceux qui demandent la mise en place d’un système politico-administrative adapté au contexte du pays1. Mais aussi, la Balkanisation perçue comme un démembrement du pays est vu par certains congolais comme pourra provenir du Kivu ; et que probablement cette région riche se verra annexer au Rwanda. A tort ou à raison, les ambitions hégémoniques de Kigali ne font pas l’objet de la discussion de cet article, mais plutôt la discussion penche à ce que serait l’avis des Kivutiens par rapport à l’annexion ou à l’indépendance. La raison de pencher sur l’avis des Kivutiens est que le point de vue de ces derniers est déterminant car toute manœuvre visant à l’annexion ne sera que possible sur consentement du peuple de cette région. Toutefois, il est fort possible que l’indépendance soit une imposition provenant de l’implosion du pays à cause de plusieurs paramètres.

Le point qui choque sur la Balkanisation et auquel l’article s’insurge est que celle-ci est interprétée comme pourra provenir de la faiblesse de Kivutiens, selon certains commentateurs congolais. Pour ces commentateurs, il s’agit d’une manière d’évoquer que le peuple Kivutien est « fainéant » du fait qu’il pourra un jour cautionner ou accepter le démembrement de la RDC. En plus de cela, nos compatriotes de l’Ouest, Nord et Centre utilisent la Balkanisation, dans plusieurs discussions en langue ‘Lingala-Français’(2), en pointant du doigt l’aspect ethno-communautaire de cette partie du pays. C’est-à-dire, ces discussions et analyses moins objectives semblent viser à diviser le peuple Kivutien en ceux-là considérés comme autochtones et « immigrés », dont leur origine serait le Rwanda. Une invention pure et simple dans la théorie de la Balkanisation.

Ces types d’analyses deviennent des manipulations dont l’intention est de diviser plus ce peuple qui a longtemps souffert des conflits armées à différentes dimensions dont le pouvoir central en a tiré profit dans le temps et même ce dernier temps. Il importe de souligner d’une manière ou d’une autre que depuis l’indépendance, le pouvoir à Kinshasa ne s’est pas fermement engagé dans la résolution des problèmes que connaissent le Kivu et l’Est du pays en général. Le mutisme des dirigeants politiques porte à croire que le pouvoir central profite de ce désordre qui conduit en la perte des vies humaines. Ces analyses de commentateurs et « analystes » constituent des manipulations et une manière de discréditer le peuple Kivutien car les événements qui se passe au Katanga, au Bandundu et même à l’Equateur ne sont pas analysés de cette manière.

En mon entendement comme ressortissant de cette région, de quoi retenir de l’avis de Kivutiens? L’annexion est hors discussion car la majorité de Kivutiens ne pourront au grand jamais l’accepter. Je suis même convaincu que ceux-là manipulés par Kigali auront difficile à s’imposer que ça soit politiquement ou par force. D’ailleurs, l’expérience a montré que ceux-là qui étaient soupçonnés de faire allégeance à Kigali se sont ouvertement opposés à leur influence et à leur mainmise sur leurs positions et avis politiques. De deux, le Rwanda est 10 fois moins petit que le Kivu, alors que rien ne prouve que le territoire Kivutien a appartenu au Rwanda dans le temps. D’une manière spécifique, sur base de ma connaissance, aucun des politiciens Kivutiens n’a jamais défendu la thèse de l’annexion et de l’indépendance contrairement aux Katangais et Kassaiens. Donc, l’annexion me semble absurde dans ce contexte et faisant rapport à la Crimee.

Bien au contraire, d’une manière dispersée et avec des divergences ethno-communautaires exploitées par certains politiciens pour plaire la hiérarchie, le peuple Kivutien a longtemps résisté aux récentes invasions extérieures. Ces invasions, comme on l’a observé, ont été apparemment conduites par des personnalités « politiques » congolaises de tendances régionales et communautaires confondues. Et d’ailleurs, n’eut été la résistance des Kivutiens, la RDC pourrait avoir difficilement résisté contre les manipulations extérieures. Il est à retenir aussi le rôle joué par les Kivutiens dans la lutte contre la dictature, l’établissement de la démocratie, la lutte pour partage équitable de ressources nationales jusque ce matin; la lutte n’a pas abouti aux réalisations souhaitées pas parce que les Kivutiens sont faibles. C’est serait du tort en pensant que les Kivutiens ne croient pas en la préservation de l’unité du pays, quelle que soit leur appartenance ethno-communautaire.

Le scénario probable qui sera imposé aux Kivutiens : La Balkanisation trouve son origine dans les 32 ans du régime prédateur de Mobutu. La succession des faits et événements n’ont pas fait que les problèmes et causes profondes de la crise Zaïro-Congolaise soient résolus. Ces problèmes peuvent se situer entre autre dans la jouissance équitable et égale vis-à-vis des ressources nationales du pays, l’adoption et la mise en place d’un système politico-administrative adapté qui pourra servir aisément le peuple ainsi que les questions de la justice et réhabilitation des victimes etc. Tous ces maux ont grandement affecté la cohésion du pays et les conséquences qui en résultent font que des solutions sont recherchées à gauche et droite.

Voilà alors que les Kivutiens, devant un fait accompli qui serait l’implosion hypothétique du pays, se verront obliger de choisir l’indépendance. Le lecteur qui a bien saisi ce point de vue peut humblement réaliser que l’implosion du pays résulterait du manque d’un leadership motivé par l’intérêt supérieur de la nation dont la cohésion et la résolution des erreurs commises dans le passé. Eu égard a ce qui précède, il est clair que diviser la population congolaise sur base ethnique, régionale ou communautaire contribuerait au déchirement de ce grand pays dont la fondation est fragile. L’implosion pourra provenir du choix du Katanga (3), du Kassaï tout comme de l’Equateur ou de n’importe quelle province. Elle reste toujours un choix imposé dont les responsables seraient les dirigeants du pays depuis l’indépendance à nos jours. Votre point de vue peut me convaincre autrement.

Ntanyoma R. Delphin

Compte Twitter @delphino12

Blog: www.easterncongotribune.com

 

 

 

 

 

 

1Le Fédéralisme et la Gouvernance Locale en République Démocratique Du Congo : http://www.cairn.info/revue-mondes-en-developpement-2006-1-page-45.htm

About admin 430 Articles
PhD & Visiting researcher @POLISatLeeds. Interest: Microeconomic Analysis of Violent Conflict, Genocide Studies and violence targeting minority groups. Congolese, blogger advocating for Equitable Redistribution of Ressources & national wealth as well as & #Justice4All #DRC. On top of that, I'm proud of being a "villageois"

Leave a Reply

Your email address will not be published.


*


This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.