
Le gouvernement de cohésion nationale tarde de voir le jour ; et tout le monde tente d’expliquer les raisons derrières ce retard qui ne seraient que connu par le chef de l’Etat Congolais. Il est vraiment raisonnable de spéculer car le premier anniversaire de ce gouvernement non encore annoncé a eu lieu le mois passé. Parmi ces spéculations, celui d’Aristote Kajibwami m’ont récemment marqué. Son article est trouvable au lien suivant. Il parle d’équilibres qui nécessitent d’être tenu en considération, dont notamment ce qu’il appelle la « Question de Tutsi » congolais. Dans son article, l’auteur fait mention du gros poste à accorder à la communauté Tutsi en disant : « mais le président de la République a promis à cette communauté [Tutsi] un «gros poste» au sein du gouvernement de cohésion nationale à venir ». On tenterait de penser que les membres de cette communauté doivent attendre l’agression de l’Est à l’Ouest pour s’y opposer afin d’obtenir un poste ministériel ! Et on peut curieusement aussi se demander les bases sur lesquelles les autres ministres seront récompensés ?
Comme le souligne l’auteur de l’article cité haut, parmi les raisons qui ont fait tarder la mise en place dudit Gouvernement de Cohésion Nationale est la promesse du chef de l’Etat faite à la communauté Tutsi de la RDC est plus particulièrement aux Banyamulenge. Selon Kajibwami, le retard de ce gouvernement ‘annoncé mille fois et mille fois reporté’ est perçu en ces termes : « Mais le chef de l’Etat semble prendre son temps pour mieux affiner les nouveaux équilibres. Parmi ces derniers, figure ce que l’on pourrait appeler «La question Tutsi», celle à la base de la récurrente instabilité de la partie orientale depuis deux décennies ». Et d’affirmer ensuite que « Cependant, cette question [Tutsi] est en soi un nœud gordien, et peut soulever l’opinion dans un sens ou un autre en fonction du traitement qu’on en fait. Ce qui n’est pas pour faciliter la tâche du numéro un rd-congolais ».
L’article de ce blog s’intéresse d’abord sur l’interprétation faite de la cohésion vis-à-vis de la représentativité qui est associée à ce dit gouvernement. De deux, le bloggeur ne croit pas en la totalité de l’analyse faite par Kajibwami par rapport à la question de Tutsi et Banyamulenge spécifiquement comme étant le ‘nœud gordien’ dans ce gouvernement tant attendu. Son avis peut être interprété comme quoi ce grand retard est causé par la nomination d’un monsieur/madame, membre de cette communauté. Toutefois, il est vrai que le ressentiment et l’interprétation erronées des faits dont est victime cette communauté parmi certaines opinions n’est pas méprisable est doit rester une préoccupation à laquelle la solution est exigée.
Tout en reconnaissant certains aspects de l’analyse faite dans l’article cité-haut, je crois que le tort de l’isolement, du manque d’infrastructures de base, de l’usage des produits locaux pour se faire de la beauté n’est plutôt pas une question à reprocher à une communauté. Il me semblerait tout au contraire qu’il s’agit d’une manière d’évoquer et saisir l’absence de l’Etat qui devrait considérer l’intérêt public et de tout son peuple sans discrimination aucune. Et il est aussi clair que l’absence de l’Etat n’a pas seulement affecté une seule communauté ethnique mais toute la société.
Ensuite, il me parait moins convainquant de mettre sur le dos d’une seule communauté la crise qu’a connu l’Est de la RDC. Il serait peut-être important de savoir disséquer la manipulation et l’instrumentalisation, sur base de certains griefs fondés, dont a fait l’objet la communauté dite Tutsi. Le fait d’avoir été manipulé et instrumentalisé par ceux-là qui promettaient tout pour se ‘forger un pont’ ne constitue en rien la raison d’imputer à cette dernière les conséquences de cette crise. Sans toutefois tenir compte de la présence des autres membres de différents groupes ethniques qui ont pris part dans d’innombrables rebellions qui ont secoué l’Est du Congo ; le fait d’avoir été instrumentalisé n’enlève en rien le soubassement de certaines réclamations. La question se poserait au contraire aux mécanismes mis en place pour résoudre durablement les problèmes de cette partie du pays, mais aussi ceux que connait le pays dans l’ensemble.
Il est à rappeler aussi que telles analyses, comme celles de Kajibwami, qui sont en quelques sortes déplacées risquent de confondre les opinions et le lecteur au point d’envenimer l’opinion public alors qu’il n’attendent pas probablement grand-chose dans la mise en place dudit gouvernement. Son analyse peut être perçue comme s’inscrivant dans la recherche de bouc émissaire qu’amorcent toujours certains politiciens qui penseraient recourir aux discours populistes pointant du doigt ceux-là qui n’ont rien n’avoir possiblement avec le désordre que connait notre pays. Il faut tout de même reconnaitre que la crise de l’Est du Congo est lointaine et devrait se résoudre dans l’établissement d’un système politico-administratif adapté au contexte congolais. Ce système politique tenant compte des diversités socio-culturelles du pays peut au fur et a mesure comprendre dans le fonds les causes lointaines?profondes de toutes ces crises. Ça reste discutable.
Tout en citant les noms de quelques personnalités Tutsi et Banyamulenge en particulier, leur passé ainsi que les enjeux autour de leur nomination, l’auteur de l’article semble lié les désaccords entre la dite communauté Tutsi de la RDC et ceux-là qui se portaient pour parrains à la crise de 2012. Si du moins ma mémoire ne me trahit pas, l’observateur bien avisé sait que ce désaccord a vu le jour au lendemain de la création de l’Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo/Zaïre (AFDL). A plus forte raison, les personnalités qui ont ,tout au départ, explicitement opposé la manipulation et l’instrumentalisation que connaissait récemment le M23, ne sont pas mentionnées dans l’article de Kajibwami. Alors, je me pose la question de savoir si depuis les années 1996, ces personnalités citées auraient opposé le parrainage pour se créer la visibilité et enfin être nommées ministres en 2015.
Il importe de reconnaitre en partie que le retard de la mise en place du gouvernement de cohésion nationale trouve son origine dans la gestion de la ‘confédération’. Toutefois, la question principale derrière ce retard du nouveau gouvernement serait liée aux échéances électorales de 2016, l’expérience de 2011 ainsi que l’épineux souci du régionalisme politique ainsi qu’un type de mécontentement au sein de la majorité présidentielle, mais aussi des ténors Katangais. Pour mieux gérer toutes ces tendances, à la venue des échéances électorales de 2016, les dirigeants au pouvoir penseraient recourir aux équilibres régionaux et communautaires en la place et lieu de la cohésion nationale.
Nonobstant, certains analystes et/ou leaders politiques congolais donnent une importance à la représentativité des communautés ethniques plutôt qu’à la cohésion. La présence d’une personnalité dans un gouvernement appartenant à une quelconque communauté signifierait en rien que ses propres avantages créent une cohésion au sein de toute la société. Personnellement, la cohésion serait un processus cohérent qui viserait à accroitre le plus possible la valeur d’appartenir à la société congolaise au détriment d’appartenir à la communauté ethnique. Donc, pour moi, la cohésion nationale passerait par des mécanismes qui nous rendent fiers d’appartenir à ce grand pays avant d’appartenir à ces grandes communautés ethniques.
Pour ce faire, si la personnalité à nommer au niveau ministériel aura la mission principale de veiller aux droits des membres de sa communauté ou de sa province, il me parait que c’est une manière d’amplifier la désintégration sociale. Pour l’intérêt de cette nation, il est mieux d’appartenir à la 12e province comme le dit l’ambassadeur Theodore Mugalu ; la province qui n’a pas d’ethnies ni des provinces et régions. Et j’ose croire que cela ne contredit en rien l’idée prônée par ce blog de la mise en place du systeme qui tiendrait compte de la diversité socioculturelle du pays.
Ce processus cohérent auquel le bloggeur fait allusion ne peut que se manifester qu’au travers les actions tangibles visant à relever le niveau de vie de ce peuple meurtri. La cohésion nationale passerait difficilement dans la nomination de personnalités appartenant à n’importe quelle communauté aussi longtemps que ces nominations créent des opportunités aux groupes privilégiés. Donc, à mon entendement, n’importe quelle personne qui tacherait à ce que ce peuple soit traité d’une manière équitable, au même pied d’égalité et sans discrimination serait la personne dont nous avons besoin pour le moment. Cette personne ne doit pas nécessairement appartenir à quelle ou quelle autre communauté. Elle est non plus cette personne qui a opposé une quelconque manipulation et instrumentalisation car les personnes l’ayant fait sont nombreuses de façon qu’ils ne peuvent pas tous être récompensées par poste ministériel.
En fin, le bloggeur pense que défendre l’intérêt du pays, opposé toute forme d’agression reste une obligation?responsabilité tout comme le sens d’une gestion saine de l’affaire publique. Avoir défendu le pays contre toute agression ne doit pas non plus être perçu comme privilège pour accumuler illégalement les richesses du pays. Ceux-là qui travaillent pour consolider la cohésion nationale doivent inévitablement considérer la distribution et redistribution équitable des richesses du pays.
Ntanyoma R. Delphin
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Email: rkmbz1973@gmail.com
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