Relations Burundi-RDC : Felix est-il le Commandant Supreme ?

Il y a deux mois presque, le Président Felix Tshisekedi a décrété l’état de siège au Nord-Kivu et en Ituri pour endiguer les phénomènes groupes armés, y compris ceux étrangers. Le Sud-Kivu n’est pas concerné par ces mesures alors que d’indices probants indiquent qu’il y a des groupes rebelles Burundais dans sa partie sud de cette province. Quelques semaines après ces mesures d’état de siège, le Président Felix Tshisekedi explique pourquoi le Sud-Kivu n’est pas concerné par ces mesures visant à stabiliser l’Est du Congo. Une raison principale, il n’y a pas de groupes étrangers, on ne doit pas tirer sur tout ce qui bouge alors que c’est un phénomène inter-communautaire!

Une semaine après, le porte-parole FARDC, Secteur Opérationnel Sukola 2 affirme que les attaques qui se sont déroulées dans le Groupement Bijombo, le Red Tabara (rebelles Burundais opérant au Sud-Kivu) ont pris part active aux côtés de MaiMai Ilunga. Tôt hier matin (13/7/2021), le Porte-parole de FARDC, le Général Léon-Richard Kasonga affirme dans une forme de diversion la présence de Red-Tabara, Forebu et FNL au Sud-Kivu. Qui dit vrai ?  

  1. Visite du Président Evariste Ndayishimiye en RDC

En date du 12 au 14 Juillet 2021, le Président Evariste Ndayishimiye (NEVA) a fait une visite d’Etat en République Démocratique du Congo (RDC). La visite s’inscrit largement dans l’approche du Président Felix Tshisekedi de se rapprocher avec les voisins de l’Est. Il y a trois semaines, le Président Felix Tshisekedi avait rencontré le Président Yoweri Museveni de l’Uganda ainsi Paul Kagame du Rwanda. La visite de NEVA a été close par un communiqué officiel mais aussi par la signature de différents accords. Un mémorandum d’entente sur les questions de développement de maintien et de renforcement de la paix, de la défense, et de la sécurité a été parmi ceux signés par les officiels de ces deux pays. En outre, parmi les questions évoquées dans le communiqué final, on fait référence aux « mécanismes concertés visant à éradiquer les groupes armés opérant sur le territoire Congolais » et à la sécurité des frontières.

  1. Présence Incontestable de Rebelles Burundais au Sud-Kivu

Parmi ces groupes armés (non explicitement cités dans le communiqué officiel), on peut croire qu’il s’agirait de Red Tabara, Forebu, et FNL qui opèrent sur le territoire Congolais depuis 2010 (pour le dernier), et 2015 pour les deux premiers. L’implication active et les atrocités commises par ces groupes armés est vécu et connu par les populations locales dans les territoires d’Uvira, Fizi, Mwenga. Depuis avril 2017, ces groupes ont commis des atrocités innombrables dans les Hauts Plateaux d’Uvira, Fizi, et Mwenga. Des milliers de personnes ont été tuées, des villages entiers détruits, l’économie de la région totalement détruite pour renforcer les capacités militaires et financières de combattants.

Pour rappeler, les attaques conjointes auxquelles ces groupes Burundais avaient activement pris part ont récemment détruit les localités de Rurambo (Mars-Avril 2021). De milliers de victimes ont été contraintes de prendre refuge dans la Plaine de la Ruzizi.  Quelques jours, ces mêmes rebelles ont attaqué les villages dans le Groupement Bijombo (en date du 29 Mai 2021) faisant de dizaines de morts, de vingtaines de personnes (hommes, femmes, enfants) pris en otages alors que de bétails sans nombre ont été razziés.  Le retour de ces personnes prises en otage été facilité par la MONUSCO après plusieurs tractations qui ont impliqué ces groupes Burundais, officiels Congolais ainsi que la MONUSCO. Bien que rien n’a officiellement été communiqué, il s’agirait d’un choix bien pensé.

En dehors de cette expérience tragique que l’Etat Congolais connait très bien, la présence de ces groupes Burundais a été documentée par les Experts de Nations Unies pour la RDC. Le soutien et appui que Kigali apporte derrière ces rebelles est un secret de polichinelle. Le Banyamulenge ont été et sont les cibles des attaques de la coalition dont les groupes locaux MaiMai ont forgé avec ces Burundais. Tout porte à croire qu’il s’agit d’un plan d’exterminer ce groupe ethnique largement contesté. Alors que de renseignements militaires de l’Armée Congolaise (FARDC) connaissent bien l’existence, la présence, la participation ainsi le voies d’approvisionnement de ces rebelles, les officiels Congolais ont souvent hésité d’en évoquer publiquement. La réflexion dans cet article soulève le questionnement par rapport aux nouvelles positions de FARDC vis-à-vis de déclarations du Président Felix Tshisekedi Tshilombo, qui en est son Commandant Supreme.

  1. Qui dit Vrai entre le Président de la République et son Armée ?  

Début Mai 2021, le Président Tshisekedi a décrété l’état de siège au Nord et en Ituri dans le souci de mettre fin à la violence et la résurgence perpétuelle de groupes armés. Pour de raisons moins convaincantes (si l’état de siège est promettant), le Sud-Kivu qui est dans les mêmes conditions d’insécurité que le Nord Kivu et l’Ituri n’est pas concerné par ces mesures. Il y a deux mois, le Président Tshisekedi étant à Paris a explicité les raisons de n’avoir pas appliqué les mesures d’état de siège au Sud-Kivu. A la question de savoir pourquoi le Sud-Kivu n’est pas concerné et par sa propre bouche, il dit (à suivre sur ce lien: cliquez) « Pourquoi pas le Sud-Kivu. Tout simplement parce que la nature du conflit au Sud-Kivu est différente de celle de l’Ituri et du Nord Kivu. Au Nord Kivu, dans ces deux dernières, Nord-Kivu et Ituri, il y a de groupes armés qui s’attaquent aux populations et ce sont parfois même de groupes armés étrangers. Tandis que du côté du Sud Kivu, ce sont des conflits communautaires ; donc, la réponse doit être différente… »

Dans la suite de son argument, le Président Felix Tshisekedi fait croire que la traque militaire est une option à ne pas envisager au Sud-Kivu car elle signifie « tirer sur tout ce qui bouge ». Partant de l’argument de conflits communautaires, il insiste que « Là, on ne doit pas venir avec l’armée pour tirer sur tout ce qui bouge. On doit plutôt avoir une approche conciliante : leur apporte de réponses par exemple vis-à-vis de la présence de l’autorité de l’état, parce que ce ça aussi qui fait que les choses vont dans tous les sens, la réponse à leurs problèmes ; il y a souvent de conflits parce que les bétails des uns vont brouter les champs des autres ; Voilà, c’est de choses comme ça qu’il faut régler… » Pour signifier que tout est résumé dans un problème entre bétails et champs. Si le Président est vraiment honnête, on n’aurait pas besoin des armes pour départager les détenteurs de champs et de bétails. La commune de Minembwe était-elle dans quelle catégorie ? En plus, que font les rebelles Burundais ?

Son approche sur les questions entre bétails et champs, au lieu de tirer sur tout ce qui bouge, « …apporter une réponse aux manques criant d’infrastructures ; lutter contre la pauvreté, et les difficultés qu’il y a là-bas, le manque des centres de sante adéquats, de routes etc. Voilà, c’est de réponses comme ça qu’il faut apporter tandis qu’en Ituri et au Nord-Kivu, il faut une réplique militaire et de grande envergure »

  1. Que Cachent les Contradictions du Président Felix Tshisekedi?

En Juin 2019, le Président Felix Tshisekedi avait annoncé des opérations militaires de grande envergure, six mois après son élection. Le cas de la violence à Minembwe a fait l’objet d’un accent particulier dans son annonce ; explicitement cité. Des renforts militaires ont suivi son annonce de Juin 2019 et une mascarade d’opérations militaires a été organisée. Au lieu de s’attaquer aux problèmes sécuritaires, ces opérations militaires ont plutôt envenimées la situation pas parce que les bétails des uns broutent les champs des autres, mais plutôt parce que la hiérarchie FARDC est parmi les premiers commanditaires de cette nième vague de violence. Dans la cacophonie autour des élections de 2018, Des commandants militaires auraient reçu de ponts de vin, immenses sommes d’argent pour que cette situation dégénère. Les cibles étaient les plus vulnérables.

Après les attaques perpètrent contre les civils dans la partie Rurambo et Bijombo, le FARDC ont affirmé, au travers son porte-parole à Uvira, que le Général auto-proclamé Ilunga de MaiMai avec les Red-Tabara se sont affrontés aux groupes Makanika. Dans cette communication, rien n’a filtré autour des atrocités commises contre les civils et surtout ceux qui avaient été pris en otage. Peut-on croire que ces rebelles Burundais auraient été repérés le 29 Mai 2021 alors que le Président Felix Tshisekedi n’en savait rien autour du 17-19 Mai 2021 ? Des atrocités contre les civils dans cette partie du pays n’ont jamais cessé depuis cette dernière vague et la participation de rebelles Burundais est plus que déterminante.

Le FARDC fait son jeu de complicité totale comme d’habitude et son Commandant Supreme n’y voit rien. Le Commandant Supreme ne connait (reconnait) jusque-là que les rebelles Burundais sont présents dans le sud Sud-Kivu. Dans la foulée de la visite officielle du Président NEVA, le FARDC annonce des attaques de grande envergure contre Makanika, Twirwaneho, Android et Gumino qui sont alliés aux groupes Burundais Red-Tabara, Forebu et FNL. Comme il s’agit d’une diversion manipulée par son armée, cette fois-là, il va le croire et mener des opérations de grande envergure alors qu’il connait bien ce secret de polichinelle? S’agit-il d’un jeu qui lèse le Burundi et son frère NEVA ou une partie de la population Congolaise ? L’avenir nous réserve de surprises.

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PhD & Visiting researcher @POLISatLeeds, proud of being a "villageois". My interest: Peace, conflict, Genocide Studies, Minority ethnic groups, DRC, African Great Lakes region. Congolese, blogger & advocate #Justice4All in #DRC.

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