Condamnations : Etats Unis & Union Européenne peuvent faire mieux ?

Drapeau USA. Credit (Padel Magasine)

Il y a au moins trois décennies que l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC) est en proie à une extrême violence. C’est depuis 2021 que le Nord-Kivu connait une guerre impliquant les pays. Les Forces Armées de la République Démocratique du Congo (FARDC) soutenues par différents groupes MaiMai locaux dits Wazalendo (patriotes) s’affrontent aux rebelles du Mouvement du 23 Mrs (M23) soutenu par le Rwanda. Actuellement, ces affrontements se concentrent dans la partie nord du Nord-Kivu (vers Lubero) ainsi que la partie Ouest de Goma, dans le territoire de Masisi.

Ce samedi 04/01/2025, le M23 a pris le contrôle de Masisi Centre. Masisi centre est une localité qui est le chef-lieu du territoire de Masisi. Cette agglomération est habité par une population estimée à plus de 40.000 habitants. Masisi centre et ses environs avaient abritaient un grand nombre de déplacés venus d’autres localités qui avaient connu d’affrontements il y a quelques mois. Ces affrontements de ce weekend ont fait qu’un nombre soit forcée de se déplacer vers Nyabiondo (22 kms) et/ou en direction de Kibua et Walikale centre (territoire de Walikale). Et pour ceux qui ont dû fuir et pour ceux qui sont restés, l’incertitude est totale car ils peuvent à tout moment être pris entre plusieurs feux.

Crise Humanitaire

En début juillet 2024, les Etats Unis avait réussi a négocié un cessez-le-feu entre les belligérants. Tout comme dans d’autres coins du Nord-Kivu, Sud-Kivu, Ituri, les conditions humanitaires sont extrêmement difficiles. La RDC occupe une seconde malheureuse place en termes de déplacés internes, après le Soudan. Il est estimé que plus de 7 millions de Congolais sont de déplacés internes à l’Est de la RDC.

La province Nord-Kivu compte à elle seule autour de 2.5 millions de déplacés internes et qui vivent des conditions inhumaines. Une grande partie de ces déplacés vit dans des zones inaccessibles au point que mêmes les humanitaires de bonne foi n’y peuvent rien. Pendant la période pluviale, les conditions dans les fins fonds de Masisi et dans le Walikale sont extrêmement difficiles pour des populations civiles qui n’ont jamais connue une paix dans le vrai sens du mot.

Condamnations des États-Unis & UE

Les États-Unis ont fermement condamné les violences perpétrées par divers groupes armés dans l’est de la RDC. Depuis lors, les hostilités ont continué, le cessez-le-feu violé, le processus de Luanda en suspens, et celui de Nairobi en panne. Les Etats Unis, l’Union Européenne, la Monusco et d’autres organisations multilatérales n’ont cessé de condamner ces violations, exiger le retrait des unités de la Rwanda Defense Force (RDF), le cantonnement du M23 ainsi la neutralisation des Forces Démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR).

Pour la énième fois, après la prise de Masisi centre par le M23, les Etats Unis ont exprimé leur désapprobation vis-à-vis de ces violations flagrantes du cessez-le-feu. L’Union Européenne a condamné « fermement l’occupation récente par le groupe armé M23 de la « ville de Masisi » et ces environs. » et juge cette avancée comme « une violation flagrante du cessez-le-feu convenu dans le cadre du processus de Luanda. » La Monusco a emboité le pas en dénonçant la prise de Masisi centre.

Ces condamnations et appels suffisent pour rassurer un citoyen Congolais qui, pendant de décennies, a vécu ce contexte sécuritaire traumatisant ? Le cessez-le-feu, l’assistance humanitaire, les condamnations sont importantes dans les conditions actuelles mais il faut repenser les approches qui œuvrent pour une paix durable. J’appelle ces partenaires de la RDC de devenir les partenaires des citoyens Congolais qui vivent ce traumatisme sans fin.

Une paix durable est-elle possible ?

La RDC a besoin de paix durable non pas par les armes mais au travers un dialogue franc et sincère (arguments partagés dans un article publié par the Conversation). Cette paix, et surtout dans sa partie Est de la RDC ne peut être obtenue qu’en s’attaquant aux causes profondes de ces conflits récurrents. Premièrement, le processus de Luanda ne devra pas être perçu comme un problème entre la RDC et le Rwanda. Il est important de reconsidérer cette initiative et inclure la crise sécuritaire entre le Burundi et le Rwanda, car très liée au contexte sécuritaire actuel en RDC. Les relations entre Kinshasa et Kampala qui avaient déclenché la récente crise autour du M23 (2021) ne sont pas à négliger. IL y a d’autres questions régionales qui nécessitent une attention particulière, y-compris les questions de droits humains et de gouvernance.

Il est tellement important de reconsidérer le processus de Nairobi pour en faire une plateforme bien équilibrée, dans laquelle toutes les parties prenantes, les représentants des groupes armés, les membres de la société civile ainsi que les représentants des communautés locales doivent s’exprimer sans crainte de représailles et sans interférences politiques de Kinshasa et/ou Kigali (pour ce qui est particulièrement des questions du Nord-Kivu et Sud-Kivu). Pendant les trois sessions tenues à Nairobi, il s’est avéré que certains participants (représentant les pays) avaient plus de pouvoir sur d’autres participants au point certains avaient une grande marge de manœuvre de sélectionner les représentants des groupes armés, de la société civile et des communautés.

Bien que considéré par Kinshasa comme un groupe au service du Rwanda, le processus de Nairobi doit directement engager des pourparlers avec le M23. Il est si impérieux de reconnaitre que les alliances (contre-alliances) entre groupes armés et les pays (armées) ne sont pas une expression sure de causes profondes que connait cette partie de la RDC. Tout en comprenant le contexte dynamique, ces groupes disparates ont leurs propres revendications et griefs qui doivent être pris en compte pour que l’est de la RDC puisse trouver la stabilité.

La stabilité de la RDC et de sa partie orientale est inévitablement liée à la gouvernance du pays ainsi qu’à la gestion de l’armée et des services de sécurité en général. Aussi longtemps que Kinshasa veut tout contrôler pour les intérêts égoïstes de politiques, les rebellions défaites donneront naissance aux nouvelles autres. La réforme de services de sécurité et le traitement humains des éléments de la police nationale congolaise et des FARDC s’imposent comme voix pour la stabilité du pays et de l’Est en particulier.

L’Equipe Eastern Congo Tribune

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PhD & Visiting researcher @POLISatLeeds, proud of being a "villageois". My interest: Peace, conflict, Genocide Studies, Minority ethnic groups, DRC, African Great Lakes region. Congolese, blogger & advocate #Justice4All in #DRC.

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